Ses dernières interviews TV (1997)

Octobre 1998. Nommé sélectionneur de l’Argentine, Marcelo Bielsa prend la décision définitive de ne plus accorder d’entretien individuel à un quelconque média (TV, radio ou presse écrite). Pourquoi ? 

• Le technicien argentin ne veut pas privilégier le gros média national au petit média local dans l’accès à l’information.
• La simplification de la presse l’inquiète. Il fait l’effort de construire ses raisonnements et de structurer ses idées mais ses propos sont relayés en une ligne dans la presse le lendemain.
• Durant le mandat de Daniel Passarella, le climat est tendu entre la sélection argentine et la presse. Face à une corporation en mal de sensationnalisme en amont de la Coupe du monde 1998 (rumeurs extra-sportives), les joueurs décident de refuser les entretiens individuels en signe de protestation. C’est dans ce contexte conflictuel que Bielsa, nommé nouveau sélectionneur quelques mois plus tard, suit le pas. Définitivement.

Ces interviews TV traduites sont donc des documents aussi rares que précieux. À ce jour et à ma connaissance, voici les 3 dernières. Datant de l’année 1997, elles témoignent des réflexions d’un entraîneur alors au tournant de sa carrière.

Reconnu en Argentine et au Mexique, le technicien de 41 ans n’a pas encore fait le grand saut en Europe et ne sait pas encore qu’il assouvira bientôt son rêve en prenant en mains l’Albiceleste. Toutes ces interviews partagent un point commun, raison pour laquelle je vous les propose : dans chacune d’elles, Bielsa livre ses réflexions sur le métier d’entraîneur, la place des joueurs et la relation entraîneur-entraîné(s) dans un football en constante évolution. 

Technicien réservé et énigmatique, ces interviews offrent ainsi l'opportunité, a posteriori, de percevoir l'esprit d'un des entraîneurs les plus influents de son temps.

Avril 1997. Sans club un an après son licenciement du club mexicain de l’América en mars 1996, Marcelo Bielsa se livre à l’exercice télévisuel pour la TV mexicaine. 

Durant 25 minutes, il répond du tac au tac aux questions posées. Il explique ainsi sa vision du football, regrette le traitement injuste subi par les entraîneurs à travers certaines références de l’époque (Arrigo Sacchi, Carlos Bianchi), différencie et explicite les deux types de joueurs (celui qui a besoin d’être épaulé à l’indépendant) avant d’évoquer son passé riche en succès et son futur incertain. 

Face à quatre journalistes interloqués par cet entraîneur iconoclaste, l’Argentin n’élude aucune question et n’hésite pas à étayer son propos pour faire entendre son discours.

Second semestre 1997. Au micro de Marcelo Fiasche pour la chaîne TN (Todo Noticias), le nouvel entraîneur de Vélez Sarsfield ne cache pas son aversion pour le milieu footballistique et son environnement.

L’Argentin révèle ainsi son malaise face à l'industrialisation croissante du football, au manichéisme constant dans la considération de la performance sportive avant de présenter les deux types d’entraîneurs qui coexistent dans le football.

Au-delà de son rôle d’entraîneur, cet entretien de 6 minutes est le témoignage d’un homme contraint d’évoluer dans un monde qui semble n’être déjà plus le sien.

N. B. : Même pas un an plus tard, Vélez remportera le Clausura 1998, soit le 3ème titre pour Bielsa après l'Apertura 1990 et le Clausura 1992.